S’il y a une excursion à ne pas manquer lors d’un séjour en Nouvelle-Calédonie, c’est bien la journée sur l’ilôt Amédée à la rencontre de son charismatique phare. Jour après nuit, depuis plus de 150 ans, sa silhouette iconique se rappelle à tous les habitants du sud-ouest de la Grande Terre surtout par beau temps.
Et une fois sur place, l’inscription Napoléon III, la date “1862” sur le linteau de la porte d’entrée et la structure métallique de l’ensemble nous replonge de manière anachronique dans l’univers des prémices de l’architecture industrielle et urbaine du second Empire.
Le bel ouvrage très documenté, écrit par Valérie Vattier, directrice du Musée maritime de Nouvelle-Calédonie et Vincent Guigueno, ingénieur spécialiste de l’histoire des phares, raconte l’histoire d’Amédée depuis sa création jusqu’à son implantation à l’autre bout du monde, en passant par sa construction et son assemblage à Paris.
Et pour aller au-delà, une visite du musée maritime de Nouvelle-Calédonie s’impose, offrant l’opportunité d’observer les 24 panneaux de sa première optique remontés en 2007 par le service des phares et balises de Nouvelle-Calédonie.
Aujourd’hui, la silhouette du phare Amédée est devenue tellement emblématique du territoire qu’elle nous apparaît comme unique au monde. Pourtant, il n’était pas pas prévu qu’il en soit ainsi…
En 1861, le phare du bout du monde était en fait un prototype et devait servir de modèle à une longue série de tours métalliques reproduites à l’identique.
Conçu avec la particularité d’être totalement démontable, la nouvelle technologie architecturale de l’époque, à savoir la construction métallique, devait permettre la préfabrication et la standardisation des objets. De plus, la taille des pièces devait être ajustée afin que celles-ci puissent être embarquées, débarquées et montées sans engin de levage sophistiqué, dans les endroits où la construction au niveau local posait un problème.
Mais, seul un deuxième exemplaire sortira des ateliers Rigolet situés aux Buttes-Chaumont à Paris (et non des ateliers Eiffel comme le veut une certaine légende…).
Ainsi, à 20.000 km de son modèle et dans un tout autre environnement, le phare des Roches-Douvres ira éclairer les côtes bretonnes au large de l’île de Bréhat jusqu’en 1944, année de sa destruction par l’armée allemande. Celui-ci aura eu néanmoins son heure de gloire, en ayant fait la une de la presse de l’époque au moment de sa sortie d’usine. En effet, la tour métallique sera présentée pendant de longs mois comme une des attractions “phares” de l’exposition universelle de 1867 à Paris, un peu plus de vingt ans avant une autre tour métallique célèbre.
Pour l’anecdote, c’est un certain Louis Stanislas Bertin, natif de Saint Servan près de Saint Malo, et breton d’adoption, qui a été chargé de la reconstruction sur site du phare de Nouvelle-Calédonie, puis de celui des Roches-Douvres.
NB : La photo au-dessus du titre représente un tableau d’Edouard Manet intitulé « L’exposition universelle de 1867 à Paris ». Il est actuellement exposé au musée national de l’art, de l’architecture et du design d’Oslo en Norvège.