Cercle Celtique de Nouméa

La gavotte de Lescouët-Gouarec

Au début de l’année, Michel B., collecteur et danseur de la region de Silfiac (22) nous a envoyé ses meilleurs voeux du Kreizh Breizh. Il en profitait aussi pour aimablement souligner les défauts de notre interprétation de la “gavotte de Lescouët” que nous avions mis en ligne depuis déjà plusieurs années. 

Michel insistait sur deux points bien précis à savoir l’exécution en ronde ouverte, alors que celle-ci s’effectue normalement en ronde fermée et surtout l’absence d’un croisé arrière au temps 7 et d’un chassé au temps 8.

Nous lui avions répondu qu’à l’époque du tournage nous nous étions inspirés d’un DVD d’apprentissage du regretté Yves Leblanc dédié aux “Danses de Bretagne les moins courantes”. A aucun moment sur la fiche d’explication ou sur la video démonstration d’accompagnement  ces deux points n’étaient précisés. 

Michel nous a alors envoyé de nombreux détails sur cette danse peu connue du Centre Bretagne, dont le texte que nous reproduisons dans les paragraphes ci-dessous.

Historique du collectage de la gavotte de Lescouët par Michel B.

J’habite sur la commune de Silfiac (56480), à 2 kilomètres du bourg de Lescouët-Gouarec (22570) où j’ai fait mes premiers pas de danse bretonne il y a 67 ans.

J’ai été stupéfait d’entendre parler de la gavotte de Lescouët lors de mon retour en Bretagne il y a 20 ans: j’avais appris toutes les danses bretonnes pratiquées dans la région sans entendre parler de gavotte de Lescouët quand j’étais môme, totalement inconnue de moi.

Participant aux derniers collectages effectués par Georges PATAUGAS, je l’ai interrogé sur le sujet mais cette danse était aussi inconnue de lui. J’ai rapidement fait le tour des danseuses les plus âgées de Lescouët qui avaient supportées ma jeunesse dans les années 50; point de gavotte de Lescouët à leur répertoire. Ce fut finalement Hervé LE LU, » talabarder » de Cléguérec qui se souvenait avoir entendu parler de cette danse du côté de LANGONNET.

Miracle en effet, quelques rares danseurs de l’ancien cercle du Bourg de Langonnet, plutôt les danseuses d’ailleurs les hommes étant presque tous morts, se souvenaient avoir dansé du Lescouët rapporté chez eux par l’accordéoniste du groupe au cours des années 60 en me précisant que pour les démonstrations je devais m’adresser aux danseurs du cercle de l’ABBAYE DE LANGONNET qui continuaient à s’entrainer.

J’ai donc procédé à un collectage selon les méthodes que m’avait enseigné Georges PAUGAM, je conclus : La GAVOTTE DE LESCOUET est une forme de KOST ER C’HOED : airs communs, tempo, allure et pas voisins.

Ce kost er c’hoed a été collecté par Yann le DOUR, l’accordéoniste du cercle de Langonnet-Bourg dans les années 60 dans la salle de Croix-Kerlann « Chez Sidonie », commune de Lescouët-Gouarec. Il était joué par André MAGUET et Job HINGANT (dit « Jobica »).

Les danseurs le pratiquant provenaient vraisemblablement de l’est de Plélauff, l’est de Lescouët, Perret et Sainte-Brigitte, les danseurs plus locaux ignorant pour la plupart cette danse. 

Personne n’ayant informé Yann LE DOUR du nom de la danse, il l’a simplement dénommée gavotte de Lescouët.

La pratique de la gavotte de Lescouët a été largement diffusée par Annette et Henri PIERRE notamment dans la région de Saint-Brieuc. Le croisement arrière du pied droit au temps 7 avec chassé du pied droit au temps 8 se perd dans cette même région probablement en raison de sa difficulté d’exécution. Par contre il est toujours pratiqué dans la région de Langonnet, surtout par les anciens des cercles.

J’ai communiqué le descriptif de cette danse et son historique à Kendalc’h il y a une quinzaine d’années.

Kost Ar C'hoed ou Pourleth ?

En complément de ce qui précède, nous notons que l’excellent site Gwalarn.bzh confirme le style Kost ar C’hoet de la danse sur sa fiche descriptive de pas qui lui est dédié en allant jusqu’à insister sur la similitude de certaines séquences.

Cependant, Yves Leblanc avait aussi collectée une gavotte de Lescouët il y a une vingtaine d’années qu’il avait classé dans les gavottes du pays Pourleth, comme il le mentionne dans ses carnets Bro-Breizh dédié à ce terroir, peut-être tout simplement du fait que Lescouët-Gouarec est rattaché à ce terroir. 

La fiche descriptive, un peu plus précise que celle du DVD éditée quelques années plus tard décrit  un croisé (avant ?) du pied droit au temps 7 (qui n’apparait plus sur celle du DVD) mais rien concernant le temps 8. 

A noter que la video démonstration de la danse relève plus effectivement du style Pourleth que du Kost ar C’hoad.

Carnet Bro Breizh Pourlet d'Yves Leblanc (que nous mettons en igne avec l'aimable autorisation de sa fille Julie)

De plus, il y a une dizaine d’années, Régis Huiban et le Cercle du Croisty ont regroupé sur un CD, 8 danses du pays Pourleth dont cette version de “Gavotte de Lescouët”.

Au final, et d’après tout ce qui précède, la caractéristique principale et commune de cette gavotte et quelqu’en soit le style selon lequel on la pratique, serait le levé de la jambe droite au temps 4.

Plusieurs "Gavottes de Lescoët" ?

Enfin et bien avant tout cela, Erwanez Galbrun évoquait déjà une « Gavotte de Lescoët » dans son ouvrage « La danse bretonne » écrit en 1936 qu’elle classait parmi les nombreuses variantes de gavottes des montagnes. 

Ainsi, on peut lire en page 59  : « Toutes les Gavottes de Montagnes se font en ronde, et chantées, mais accompagnées parfois, en même temps, du biniou et de la bombarde, et plus on se rapproche du Morbihan, plus elles comportent des martèlements sur place et des mouvements de bras – exemple : la Gavotte de Lescouët que donne si joliment les danseurs du Cercle Celtique du Pelem – qui les apparentent aux Ridées du Vannetais.« 

L’ouvrage ne décrit pas la danse mais la partition de la musique qui l’accompagnait est retranscrite en page 109.

A méditer…

A propos des cercles celtiques de Langonnet

Olivier Le Dour, petit-fils de Yann Dour, dont il a été question plus haut nous a aimablement communiqué l’information suivante :

« Yann Dour, qui avait collecté cet air, n’était pas accordéoniste (Il existe un autre Yann Dour, qui, lui, l’est, est encore vivant mais n’est pas de Langonnet). Yann Dour (1904-1990), mon grand-père, était seulement chanteur, danseur et effectivement, longtemps animateur du cercle celtique du bourg de Langonnet. »

On trouve sur le site très fourni de la fête des « Filets bleus » de Concarneau, de belles pages historiques dédiées aux cercles et bagads de Bretagne. Parmi elles, figurent celles consacrées au « Cercle Korollerien An Ellé » de l’Abbaye de Langonnet » et au « Cercle War Hent Hon Tadou » du bourg de Langonnet.